Le littoral est un milieu riche, tant pour la faune et la flore de l’estran que pour les paysages et le patrimoine qu’il représente. Ce milieu est, par nature, soumis à une pression naturelle importante liée aux marées mais les activités anthropiques pratiquées sur le littoral, qu'elles soient professionnelles ou de loisirs, impactent également de façon notable les habitats intertidaux. Il parait donc important de mieux connaitre ce milieu afin de sensibiliser les usagers du littoral à son fonctionnement.
Dans ce contexte, le projet PACHA « application de Protocoles pour l’Amélioration des Connaissances sur les HAbitats intertidaux de la Manche, de la Baie du Mont-Saint-Michel au Cap Gris-Nez » vise à améliorer les connaissances sur le littoral compris entre la baie du Mont-Saint-Michel (dans la Manche) et le Cap Gris-Nez (dans le Pas-de-Calais), afin de prendre en compte une échelle géographique cohérente avec la variabilité du milieu.
Tout d’abord, dans le but d’homogénéiser les protocoles d’acquisition de données au sein du secteur d’étude, l’Action 1 « Extension du protocole Faune Flore » du projet consiste à étendre le protocole « Faune-Flore », utilisé pour le suivi des platiers rocheux à dominance algale par la CSLN depuis 1996 sur le département de Seine-Maritime, aux platiers des départements de la Manche, du Calvados et des Hauts-de-France. De plus, le GEMEL-Normandie a mis au point un protocole de suivi des platiers rocheux à dominance faune dans le Calvados en 2019. Dans ce cadre, huit sites ont été suivis pendant trois ans. L'objectif est de poursuivre l’étude à moyen terme sur trois sites du Calvados et de tester ce protocole à une échelle plus large, en Seine-Maritime et dans les Hauts-de-France. Ainsi, sur le littoral des Hauts-de-France (entre le Tréport et le Cap Gris-Nez), deux sites sont suivis : le Bois de Cise à Ault (Estuaires et littoral picards : baies de Somme et d'Authie – FR2200346) et le Noirda à Audresselles (Site de suivi DCE Macroalgues Audresselles IR SIDB14 et Natura 2000 Falaises du Cran aux Œufs et du Cap Gris-Nez, Dunes du Châtelet, Marais de Tardinghen et Dunes de Wissant - FR3100478).
La laisse de mer est un milieu important pour le fonctionnement de l’environnement littoral mais mal connu sur les côtes de Normandie et des Hauts-de-France. Cet habitat pérenne mais renouvelé en permanence est le lieu de recyclage de la matière animale et végétale en échouage. En plus de la faune spécifique du cycle de dégradation, elle sert de zone d’alimentation ou de reproduction pour certains oiseaux. Malgré cela, il s’avère que les protocoles de suivis existants ne sont pas adaptés aux plages présentant des cordons de galets, des platiers rocheux ou les estuaires. Ainsi, dans le but d’améliorer les connaissances sur ce milieu particulier, l’Action 2 « Laisse de mer » consiste à tester un protocole de suivi de la faune présente dans les laisses de mer de plusieurs zones Natura 2000 du secteur étudié avec plusieurs modalités sur six sites : type de substrat (sable, roche et galets), à deux saisons et à trois périodes après le dépôt. Un projet sur les laisses de mer (Guide MDP “Macro Déchets de Plage” (2018-2019)) piloté par le Parc Naturel Marin des Estuaires picards et de la mer d’Opale (PNM EPMO) est en cours sur le littoral des Hauts-de-France. Afin d’éviter des redondances, cette zone géographique n’est pas étudiée dans le cadre de ce projet par le GEMEL sur ce secteur d’étude.
Les mouvements sédimentaires sont nombreux et peuvent être importants sur les platiers rocheux de Normandie et des Hauts-de-France, affectant les habitats en place, quelquefois de manière durable. Ainsi, l’Action 3 « Suivi de l’ensablement des platiers rocheux » consiste à étudier les évolutions surfaciques (survols en drone) et l’évolution de la hauteur de ces dépôts (mesures in situ). Cette action est réalisée sur deux sites des Hauts-de-France : le Bois de Cise et les Ningles à Outreau (N2000 Estuaire de la Canche, dunes picardes plaquées à l’ancienne falaise, forêt d’Hardelot et falaise d’Equihen - FR3100480).
L’Action 4 « Faune des placages de sable » consiste en l’étude de la faune présente dans ces placages de sable participant à la biodiversité des sites, notamment dans les zones Natura 2000. En effet, sur certains platiers rocheux, les zones sableuses sont très étendues et quasiment permanentes. Il est donc intéressant de savoir si de la faune est présente dans ces sédiments meubles, celle-ci participant à la biodiversité des estrans mais étant totalement sous-estimée. Ainsi, pour les mêmes sites que ceux identifiés pour l’Action 3, sur lesquels le platier rocheux est ensablé et pour lesquels les surfaces et les profondeurs de sables sont suffisantes, des prélèvements (selon le protocole DCE pour les substrats meubles intertidaux) ont été réalisés afin d’évaluer la diversité présente dans ces milieux meubles. Il s’agit donc pour le littoral des Hauts-de-France des sites suivants : le Bois de Cise et les Ningles.
Finalement, afin d’avoir une vision globale des milieux littoraux rocheux du secteur d’étude, l’Action 5 « Cartographie des habitats et état de conservation » consiste à réaliser une cartographie et un état de conservation (élément important pour les DOCOB des sites Natura 2000, réalisé grâce à la méthodologie du MNHN) des habitats de divers secteurs pertinents sur le linéaire de la zone d’étude. Pour se faire, des survols en drone, dans la mesure du possible mutualisés avec le suivi des mouvements sédimentaires, ont été réalisés sur les secteurs à dominance rocheuses visés, puis des relevés terrain ont été effectués afin d’affiner la typologie des habitats présents. Les trois sites suivis par le GEMEL dans les Hauts-de-France ont été cartographiés selon le référentiel EUNIS (référence européenne) : le Bois de Cise, les Ningles et le Noirda.
Au final, l’ensemble des données acquises au sein de la sous-région marine Manche-Mer du Nord permettra d’alimenter le Plan d’Action pour le Milieu Marin (PAMM) et de caractériser le bon état écologique de ce territoire littoral.